La croyance au loup-garou nous vient, semble-t-il, comme le mot, des forêts germaniques. Dans la société traditionnelle, les jeunes devaient y rester seuls et nus dans la forêt pour leur initiation guerrière, avec une simple dague, et ils devaient en revenir vêtus d'une peau de loup. Par ailleurs les Ulfhedhinn, « qui a une peau de loup », étaient des individus vivant en marge de la société. Ils se faisaient héberger l'hiver et avaient alors tous les droits. Mais c'étaient également eux qui défendaient la société en combattant, nus et en transe.
Cette origine cependant ne doit pas faire oublier l'universalité de cette figure : l'Epopée de Gilgamesh l'évoque dès 2000 av. J.-C., et les auteurs de l'Antiquité n'hésitent pas à parler de cas de lycanthropie : Hérodote, Ovide, Virgile, Pline l'Ancien, Pétrone dans son Satyricon ou Pausanias, et à Rome, pour célébrer le dieu Pan, les luperques - les « hommes-loups » - couraient nus par la ville, une peau de bouc sur les épaules, hurlant et frappant de lanières de cuir les femmes enceintes ou souhaitant devenir fécondes. Et aux loups-garous répondent, sous d'autres cieux, les hommes-léopards, les hommes-tigres ou les hommes-requins.
Les loups-garous étaient une réalité pour le Moyen Age et jusqu'au XVIIème siècle, comme en témoignent les innombrables procès d'hommes soupçonnés avoir subi cette métamorphose, qui furent suppliciés et condamnés à mort.
D'un mot vieux francique werwolf qui associe *wari, "homme, guerrier " et wulf, "loup") et que l'on retrouve dans l'anglais werewolf. Wari a donné « garou » en français, tandis que le mot d'origine latine a remplacé wulf.
Lycanthrope, et, selon les régions, garou, galoup, lépérou, loup-bourru, loup-vérou, loup-bourru, loup-brou garrol, varolle, loup-cerve, bête gigourne ou bigourne (en Poitou), ch'leu warou (en Picardie), birette, bzou (dans le Nivernais), galipotte (en Côte-d'Or) ... En Vendée, il est souvent féminisé en « garache ». Le nom générique de « loup-garou » s'applique également à des transformations en divers animaux parfois plus inoffensifs, comme la « bidoche » qui désigne une chèvre ou mouton blanc, ou le loubérou en Périgord, qui demande à être porté sur le dos des passants et qui peut prendre la forme d'un lièvre ou de toutes sortes d'animaux.
Le loup-garou est un homme qui, à la pleine lune, abandonne ses vêtements, se transforme physiquement et mentalement en loup et, sous cette forme, attaque hommes et troupeaux en faisant preuve d'une force extraordinaire et de la plus grande cruauté, avant de retrouver son aspect humain quand le jour se lève. A l'origine, le loup-garou répond à l'antique peur du loup qui hantait les campagnes nocturnes, et à la fascination exercée par cet animal puissant et assoiffé de sang, sentiments qui pouvaient susciter les symptômes pathologiques de la « rage lupine » ou « folie louvière ». Et pourtant quel animal est plus semblable au loup que le chien, le fidèle compagnon de l'homme ? Dès lors la sauvage indépendance du loup suscite crainte et admiration, donnant notamment naissance aux légendes des meneurs de loups ou des loups-garous. Le mode de transformation varie selon les traditions. Elle peut être subie ou volontaire, elle peut résulter de certaines circonstances (le fait d'être né coiffé, par exemple), de la morsure d'un autre garou ou d'une malédiction : certains hommes sont condamnés à courir la campagne sous forme animale, et ainsi à visiter chaque nuit sept paroisses, jusqu'à ce que quelqu'un les blesse et les libère ainsi de leur malédiction en faisant couler leur sang. Sébillot note que, dans le Sud-Ouest et le Centre, la transformation s'opère par un passage dans l'eau d'une fontaine ou d'une mare. On dit qu'on ne peut tuer un loup-garou qu'avec une balle d'argent, de préférence bénite. De nombreux cas de garous blessés ou estropiés sont par ailleurs signalés, et on peut observer ces stigmates, le jour levé, sur les personnes qui ont subi la métamorphose, ce qui permet de les identifier. Par contre celui qui ne retrouve pas ses vêtements à la fin de la nuit est condamné à continuer à errer sous forme de loup, d'où la nécessité de les bien cacher. On peut encore les reconnaître, dit-on, sous leur forme humaine à certains signes mineurs (une pilosité sur les paumes des mains, par exemple) et l'on suggère qu'ils portent leurs poils à l'intérieur, entre chair et peau. Le loup-garou incarne bien sûr, dans un monde christianisé, une présence diabolique. Les sorciers étaient dits se métamorphoser avec le concours du Diable. Jean-Loïc Le Quellec signale que cette figure pourrait être l'ultime survivance d'antiques pratiques chamaniques, et qu'elle pourrait également se souvenir de pratiques liées au rituel calendaire de certaines confréries masculines et naturellement diabolisées par l'Eglise. Il ne faut pas oublier non plus la composante sexuelle de cette transformation périodique, et sanglante. La sexualité se trouve exacerbée au même titre que la force physique. La louve n'était-elle pas réputée comme un animal particulièrement lubrique, au point d'avoir donné son nom (lupa) aux lupanars ? Chris Knight suggère à ce sujet que le saignement menstruel de la femme est un phénomène culturel, lié à la périodicité de la chasse.
Abondante bibliographie (et filmographie), dont nous ne citerons que : - Jean-Loïc LE QUELLEC, Petit Dictionnaire de zoologie mythique, Paris, Editions Entente, 1996. - Claude LECOUTEUX, Fées, sorcières et loups-garous au Moyen-Age, Imago, 1993 . - Adam DOUGLAS, Loup-garou, qui es-tu ?, Paris, Zélie, 1993. - Chris KNIGHT, Blood Relations, Yale University Press, 1991. - Alain POZZUOLI, Les Morsures du loup-garou, anthologie, Les Belles-Lettres,2004. - Eliott O’DONNELL, Werewolves, New-York, Wholesale Book Corp. Ed., 1972. - Henri DONTENVILLE, « Les loups garous », Bulletin de la Société de Mythologie Française n° 5. - Claude LECOUTEUX, Note sur le loup-garou, Bulletin de la Société de Mythologie Française n° 136. - Claude LECOUTEUX, Voirloup et loup-garou, quelques remarques, Bulletin de la Société de Mythologie Française n° 143. - J. Collin de PLANCY, Dictionnaire infernal ou Répertoire universel des êtres, des personnages, des livres, des faits et des choses qui tiennent aux apparitions, aux divinations, à la magie, au commerce de l'enfer, aux démons, aux sorciers, aux sciences occultes, aux grimoires, à la cabale, aux esprits élémentaires, au grand oeuvre, aux prodiges, aux erreurs et aux préjugés aux impostures, aux arts des bohémiens, aux superstitions diverses, éd. Mongie Aîné, 1825 – Rééd. 10.18, 1999. - Félix BOURQUELOT, Recherches sur la lycanthropie, 1849. - Henry BOGUET, Discours exécrable des sorciers, 1603. - Jean Bodin, De la Démonomanie des Sorciers, Paris, 1580. - Marie de FRANCE, Bisclavret, Le lai de Mélion - Gervais de TILBURY, Otia imperialia - Claude SEIGNOLLE, « Comme une odeur de loup », Histoires sorcières, Paris, Minerve, 1988. Ainsi que, parmi les sites Internet : - L'encyclopédie Libre Wikipédia http://fr.wikipedia.org/wiki/Loup-garou - http://www.euroloup.com/troploupgarouaccueil.htm