Les paroisses portant le nom de saint Mars sont concentrées en un cercle entourant la province d'Anjou. Une seule d'entre elles échappe à cette règle et se trouve en Brie : Saint-Mars-Vieux-Maisons. Il s'agit en fait - comme en d'autres lieux les Saint-Mard, Saint-Mards, Saint-Méard, Saint-Merd ou certains Saint-Marc - de paroisses consacrées à saint Médard. Ce vocable a connu une large diffusion à l'époque carolingienne sous l'influence de l'abbaye Saint-Médard de Soissons. Mais le choix et la persistance régionale de cette dénomination particulière est remarquable, surtout en ce qui concerne les anciens diocèses de Nantes et du Mans. D'autant plus qu'elle coïncide avec les lieux qui ont vu se dérouler l'histoire de saint Mars, et qu'elle souligne l'ancienne zone d'influence du dieu Mars dans le Val de Loire, telle qu'a pu la définir Michel Provost. Bais, qui est particulièrement attaché à ce saint, s'inscrit parfaitement dans ce schéma, et établit en quelque sorte le lien entre les sites de la région nantaise et du Maine. Et même si le dieu Mars n'a pas été identifié à Bais, il n'en reste pas moins qu'au-delà des vestiges mérovingiens et des traces gallo-romaines, on y a trouvé une curieuse statuette d'origine probablement celtique qui, selon Jean-Claude Meuret, attesterait de la présence d'un lieu de culte pré-romain. Cette statue, dite tricéphale et ithyphallique, mais représentant en fait « trois hommes nus et droits, accolés bras contre bras, jambe contre jambe et tête contre tête », dont les sexes sont en érection, semble bien être liée à un rite de fécondité. Ses traits étaient soulignés au moyen d'une sorte de goudron noir et brillant. A noter que, curieusement, on peut observer non loin de Bais, sur la chaire extérieure de l'église de Vitré, une tête tricéphale parmi des figurations de dragon, phénix et anguipède. Vitré incidemment, qui joue un rôle dans l'histoire des reliques de saint Mars, aurait été autrefois, selon certains, un Fanum Martis, un « temple de Mars ». Il ne faut pas oublier que pour ainsi dire tous les Saint-Mars sont des lieux d'implantation ancienne, et que les noms attestés (pour la plupart Sanctus Medardus) ne remontent que très exceptionnellement et très peu au-delà de l'an 1000. On se trouve donc enclin à se demander s'il n'y a pas eu attirance vers des sites déjà connotés par ce vocable "Mars", dans la mesure où certains de ces lieux (Saint-Mars-la-Jaille et Saint-Mars-du-Désert, notamment, en Loire-Atlantique) étaient anciennement associés à un culte du dieu Mars. On aurait assisté là, dans un premier temps, à la christianisation d'anciens cultes païens, et, au-delà de "Saint-Médard", la nouvelle dénomination aurait fait ressurgir d'anciennes appellations ou dédicaces. A moins que l'influence se soit exercée simplement a posteriori, et que ce soit le poids des anciennes dévotions qui ait fait évoluer "Médard" en "Mars". Jean Paul Lelu n'a-t-il pas relevé (BSMF 115) une imprégnation identique du nom de Belen dans le nom de paroisses dédiées à saint Bénigne ? On peut également lire autrement le mot "mars" : il peut s'agir de régions frontalières, de marche (marz), ou de régions marécageuses (marsh). Ces interprétations pourraient convenir à bien des sites, et elles ne s'excluent pas nécessairement les unes les autres. N'oublions pas qu'en mythologie plus qu'en tout autre domaine, la polysémie s'impose, et qu'il est souvent judicieux de n'exclure aucune piste.
Saint Médard protégé de la pluie par un aigle, dans l'église de Saint-Mars-de-Coutais