L'ours est un mammifère carnivore plantigrade, de la famille des ursidés.
Du fait de sa capacité à se tenir debout sur ses pattes arrières, et de sa nature omnivore, il s'affirme comme un animal proche de l'homme. Il y a tout lieu de penser qu'à la préhistoire les deux espèces sont fréquemment entrées en concurrence pour l'habitat ou pour la nourriture, et l'on peut supposer certains accommodements réglant leurs rapports quotidiens.
Certaines légendes montrent l'ourse élevant un bébé humain, quand ce n'est pas le mâle qui engendre avec une femme un enfant mi-ours mi-homme. Et la coutume des mères aïnoues, au nord du Japon, d'allaiter des oursons semble témoigner d'anciennes pratiques plus largement répandues. La tradition des montreurs d'ours traduit à sa façon cet antique compagnonnage.
Dans certains contes, on voit l'animal défaire sa fourrure en rentrant chez lui, l'accrocher au mur, et redevenir homme. Jean-Dominique Lajoux note très justement que « velu, l'homme est un ours ; rasé et glabre, l'ours est un homme ». Traditions et légendes s'emparent de cette observation, tandis que les célébrations qui, à travers le monde, sont consacrées à l'ours, à la fois craint et révéré, plaident pour l'existence d’une primitive « religion de l'ours ».
Trois racines principales désignent l'ours dans les pays européens :
- le latin ursus.
- le celte arz, artos, qui a donné le mot « arctique » (lequel concerne la constellation de la Grande Ourse, et par conséquent le Pôle Nord), aussi bien que le nom du roi Arthur.- le germain ber que l'on retrouve entre autres dans le nom des villes de Berne et de Berlin, et dans le prénom Bernard.
La crainte respectueuse qu'a toujours inspiré l'ours a conduit les différents peuples à le désigner par des surnoms ou des périphrases : il ne saurait être question qu'il risque d'entendre prononcer son nom lorsque l'on s'apprête à le chasser (il est connu que l'ours entend tout, même si l'on est à des kilomètres et que l'on chuchote !) ... Parmi la multitude de noms qui lui ont ainsi été attribués, on peut relever : "le velu", "le terrible", le grand homme","le marcheur", "mangeur de miel", "patte de miel", "grand-père" ... En France, c'est souvent « brun ». Mais le nom le plus courant reste sans doute « Martin ». On a pu dire que c'est la St-Martin (le 11 novembre) qui marque le début de son hibernation. Jacques Bégouen rapporte une légende pyrénéenne qui met en scène saint Martin : il rend visite au futur saint Valier, premier évêque du Couserans, qui était si pauvre qu'il devait faire ses tournées épiscopales à pied. Touché par sa situation, Martin lui abandonna son âne, auquel en reconnaissance Valier donna le nom de Martin. Mais un jour un ours dévora le pauvre animal. Alors l'évêque somma le glouton de remplacer l'âne, et c'est en sa docile compagnie que désormais il parcourut la montagne. A l'ours échut le nom de Martin, et c'est sous cette appellation qu'il devint familier des villageois des environs.
L'ours, à la fois familier et redoutable, a suscité bien des légendes. C'est ainsi que l'ermite saint Aventin rencontre un ours qui le supplie de lui enlever une épine du pied. Saint Vaast, évêque d'Arras, découvre une région, autrefois évangélisée et retombée dans le paganisme ; l'église, abandonnée, est devenue le domaine des animaux ; Vaast y rencontre un ours auquel il demande de gentiment laisser la place aux fidèles. En Alsace, une vision suggère à sainte Richarde de fonder son monastère là où elle trouverait une ourse et son ourson mort. A Angles, en Vendée, c'est un abbé Martin qui vient à bout d'un ours redoutable en le faisant grimper au pignon de l'église et en l'y pétrifiant ... Ces anecdotes vont dans le même sens que celles qui opposent certains saints aux dragons : il s'agit de réprimer les dernières traces du paganisme, de les soumettre et les mettre au service de la religion, ou bien de les repousser hors de l'espace humain et civilisé. Du fait de son hibernation, de son enfouissement en hiver, l'ours a été considéré comme un intermédiaire entre la surface de la terre et les profondeurs infernales, entre le monde des vivants et celui des morts. Et la légende donne bien ce rôle à Jean de l'Ours qui se rend tout au fond d'un puits afin de libérer trois princesses qui y sont tenues prisonnières. Cet animal évoque également l'homme primitif, non socialisé, l'homme sauvage, que l'on a pu considérer comme « le chaînon intermédiaire entre l'homme et l'ours. C'est-à-dire le fils d'une femme et d'un ours » (J.-D. Lajoux). Et de fait, de Jean de l'Ours à Boucle d'Or, les histoires ne manquent pas qui unissent l'ours à un personnage féminin : la femme, parfois enlevée de force, se réfugie parfois d'elle-même dans la tanière de l'animal, et se satisfait apparemment de cette compagnie : cet animal ne jouit-il pas d'une solide réputation pour sa vigueur sexuelle ? Et leur union se matérialise avec la naissance d'un fils. A noter le nom qui revient fréquemment, dans les contes et les traditions populaires, pour ce partenaire féminin : Rose, Rosetta ou, dans Valentin et Orson, Rosemund. Est-ce par hasard si ce nom est un leitmotiv dans les chants accompagnant le carnaval de Dunkerque ? Enfin on ne peut pas ne pas mentionner les saints ursins, même si ce ne sont que leurs noms qui ont induit un rapport avec l'animal. Ils remontent pour la plupart aux origines de la chrétienté sur notre territoire (IV-Vèmes siècles). Ce sont : les saints Ours, évêques de Troyes, d'Auxerre ou de Toul, ou abbé qui fonda le monastère de Loches (37), saint Ursin, premier évêque de Bourges, ou saint Ursinicus qui fut ermite à Saint-Ursanne, en Suisse.
- Jean-Dominique LAJOUX, L'Homme et l'ours, Grenoble, Glénat,1996. - Claude GAIGNEBET et Jean-Dominique LAJOUX, Art profane et religion populaire au Moyen Age, PUF, 1985. - Michel PRANEUF, L'Ours et les hommes dans les traditions européennes, Paris, Imago, 1989. - François-Régis GASTOU, Sur les traces des montreurs d'ours des Pyrénées et d'ailleurs, Toulouse, Loubatières, 1987. - Olivier de MARLIAVE, Trésor de la mythologie pyrénéenne, Editions Sud-Ouest, 2005. - Jacques BEGOUEN, L'Ours Martin d'Ariège-Pyrénées, Saint-Girons, Impr, Y, Mauri, 1966. - Arnold Van Gennep, Manuel de folklore français, vol. 1. - Claude GAIGNEBET, Le Carnaval, Paris, 1974. - Claude SEIGNOLLE, Jean de l'Ours, Hesse, 2004. - Orson et Valentin, Nathan, 1990. - Michel BOURNAUD, 21 Contes d'oursCastor Poche Flammarion, 1998. - Les contes comme Boucle d'Or, Jean de Fer, L'Homme à la peau d'ours ... L'ours et le cinéma (Un jour sans fin : http://www.mythofrancaise.asso.fr/3_nouvel/Joursansfinlivret.pdf.