Bieuzy, avec son site avancé de Castennec, sur une position dominante au creux d'une boucle de la vallée du Blavet, est un très ancien lieu de civilisation, hautement symbolique. Le territoire de la commune est occupé dès la préhistoire, et il abrite, à l'époque gallo-romaine, une ville connue sous le nom de Sulim. C'est probablement de cette époque que date l'énigmatique statue de la Vénus de Quinipily, trouvée à Castennec. Mais c'est au VIème siècle que Bieuzy trouve son nom et entre véritablement dans l'histoire et la légende dorée avec la présence de saint Bieuzy et de son maître saint Gildas.
Le Blavet au pied de Castennec
- Gwenc'hlan LE SCOUEZEC, Guide de la Bretagne mystérieuse, Tchou, Paris, 1966
- Albert LE GRAND, Les Vies des saints de la Bretagne Armorique, 1636 - Quimper, J. Salaun, 1901
Divers mégalithes, dont le dolmen de Kermabon (En tri mein), et des outils préhistoriques trouvés sur les terrasses alluviales attestent de l'antiquité du site. Le camp romain de la Couarde et le site de Castennec, au-dessus du Blavet, constituent les premiers établissements attestés à l'époque gallo-romaine, avec une forteresse et plusieurs villae. Et il est probable que des sources (thermales ?) aient été en ces lieux l'objet d'un culte des eaux, pérennisé par le nom, encore utilisé récemment, de Bieuzy-les-Eaux (comme par celui de Saint-Nicolas-des-Eaux, sur l'autre rive du Blavet).
En retrait de l'éperon rocheux de Castennec, culminant à 124 mètres, en un point stratégique au creux d'une boucle du cours navigable du Blavet (on parle même de « presqu'île »), et au croisement des routes romaines Rennes-Quimper et Vannes-Carhaix.
Le Blavet au pied de Castennec
Bieuzy-Lanvaux (56), Pré-Buzy (Plouvara, 22), Saint-Bieuzy (Ploemeur, 56), Saint-Bihy (22), Castonnez (Avessac).
Le dolmen de Kermabon
Vue aérienne de Castennec
- Pardon de saint Bieuzy le dimanche le plus proche du 24 novembre.
- A l'ermitage : pardon de saint Gildas le lundi de Pentecôte.
- A la chapelle de la Trinité, pardons le dimanche de la Trinité et le deuxième dimanche du Rosaire.
- A la chapelle Saint-Samson, pardon le premier dimanche de septembre.
- A la chapelle de la Vraie-Croix, pardon le 3ème dimanche de septembre.
- Le nom de Bieuzy vient officiellement de celui du saint qui y a vécu. On a également écrit Beuzi, Buzy ou Beuzy, Saint-Bilce, Beuthy, Bizuy...), et l'on a pu supposer à l'époque gallo-romaine, un B/Isi ou Bee-Isi (Bez-Isis), qui désignerait une « tombe d'Isis » en référence avec la Vénus de Quinipily qui dès lors représenterait une Isis déplorant la mort d'Osiris.
- La désignation « Les-Eaux », qui s'appliquait encore récemment à la commune, peut faire référence au cours du Blavet, pourtant bien distinct de l'implantation du bourg qui le surplombe, ou aux vertus de la fontaine Saint-Bieuzy, mais plus sûrement à un possible culte des eaux à l'époque gallo-romaine. Plusieurs sources remarquables existent encore sur la commune, et l'on peut s'interroger sur le lien entre un tel culte et la statue de la « Vénus » qui aujourd'hui se dresse au-dessus d'une grande vasque destinée à recueillir une eau courante. A noter les communes limitrophes de Saint-Nicolas-des-Eaux et du Sourn, désignant en breton une source.
- L'ancien nom de Sulim est à rapprocher de celui de la ville anglaise de Bath : Aquae Sulis, ou Aquis Solis, également associé à une ville d'eaux. Parfois accolé au nom de Minerve, il ferait allusion au soleil, ou du moins à une déesse solaire Sulevia ou Sulis.
Le nom de Castennec, où un ancien château du Xème ou XIème siècle était connu sous le nom de Castellum Noïec ou Castel-Noec, pourrait également évoquer, comme Quistinic non loin de là, une « châtaigneraie ».
- La presqu'île de la Couarde, qui prolonge le site de Castennec, s'explique par le breton gward, désignant une position défensive.
Bieuzy peut revendiquer un riche environnement préhistorique avec entre autres le dolmen de Kermabon, d'anciens menhirs sur la colline de Castennec, attestés par une gravure ancienne, plusieurs tumulus dans les environs, et le peulvan de Keroret, autrefois sur la commune. Le site fut apparemment un retranchement néolithique avant de devenir un oppidum gaulois.
Castennec fut ensuite le siège d'un vicus connu sous le nom de Sulis ou Sulim, regroupant des fortifications et de nombreuses villae gallo-romaines jusqu'en l'an 406.
Au Moyen Age, on n'y comptabilise pas moins de cinq établissements religieux appartenant à des ordres tels que Saint-Gildas de Rhuys, Saint-Sauveur de Redon, Saint-Florent de Saumur. C'est également là que se trouvait (au XIIème siècle) le premier château d'Alain de Rohan.
En 1869, Bieuzy-les-Eaux perdra plusieurs villages (Kerdanet, Neveit, Lescouët et Trébonin) au profit de la commune de Le Sourn.
L'ermitage de saint Gildas
Saint Bieuzy (chapelle de l'ermitage de saint Gildas)
La stèle gauloise
On a pu faire intervenir le nom de l'Isis égyptienne dans la formation du toponyme Bieuzy - le simple nom du lieu, en ce cas, avant d'être celui du saint avancé par l'étymologie officielle, sans aucun des préfixes (Saint-, plou-, loc- ...) qui accompagnent habituellement le nom des saints. On peut dès lors s'interroger sur la véritable nature du disciple de saint Gildas, dont la vie est loin d'être exempte de légendaire.
Quoiqu'il en soit, la présence de la colossale statue de la « Vénus » sur la colline de Castennec suggère un culte de la fécondité, certainement lié à la présence romaine, mais bien probablement aussi héritière de traditions locales. En témoigne la stèle gauloise, dite aussi stèle ovoïde, qui subsiste non loin de l'ancien emplacement de la statue et que l'on propose de dater du Vème siècle av. J.C. Elle est effectivement désignée comme « Boule de Vénus, ou de la déesse ». Ce type de pierre très particulier, où l'on peut reconnaître une forme phallique, se retrouve fréquemment en Bretagne, souvent placée à proximité de chapelles.
Sans doute faut-il également rechercher à Bieuzy les traces d'un rite solaire suggéré par le nom de l'établissement gallo-romain, Sulim, associé à la déesse solaire gauloise Sulevia. Une apparition, au début du XVIIIème siècle, pourrait s'en faire l'écho : alors que l'on rendait un culte à Notre-Dame-des-Rois (ou, par déformation, « de-la-Rouille ») à la chapelle de la Trinité, sur la colline de Castennec, un homme aurait vu paraître une « grande dame brillante de clarté ». Indépendamment de l'importance du culte de la Trinité dans les environs, il peut être intéressant d'interroger ce site élevé, exposé en plein sud au-dessus du Blavet, par rapport au thème récurrent dans diverses traditions selon lequel celui qui se lève tôt le jour de la Trinité et qui monte au haut d'une colline, peut voir se lever trois soleils. L'exceptionnelle situation de la chapelle, au-dessus de la boucle du Blavet, est à rapprocher de tous ces lieux consacrés à la Trinité qu'a signalés Paul Bailly (BSMF 165-166), d'où l'on peut contempler le soleil du levant, le soleil du midi et le soleil du couchant.
Parmi les statues de cette même chapelle, deux sont censées représenter sainte Tréphine et son fils saint Trémeur, en souvenir de la légende attachée en ces lieux à saint Gildas : mariée au « Barbe Bleue » Conomor, Tréphine subit le sort de ses précédentes femmes dès qu'elles se trouvaient enceintes : il la décapita. Saint Gildas, qui avait consacré son mariage, la ressuscite et elle peut ainsi mettre son fils au monde. C'est à Bieuzy que le père de Tréphine, le comte de Vannes, serait venu demander à saint Gildas de la ressusciter, et c'est à la suite de ce miracle que Gildas se trouva contraint de s'exiler à Rhuys, pour échapper aux représailles.
Le site de Bieuzy est marqué par le thème de la rage, cause de la mort violente de son saint patron : la fontaine de Saint-Bieuzy protège de la folie et de la rage, tue les chiens enragés, et guérit personnes et animaux qui ont été mordus par eux.
La stèle gauloise
La Vénus de Quinipily, vue de dos
La Vénus de Quinipily, vue de dos
Léon Quillère, maire de Bieuzy
Michel Le Mouel
Marc Peres
Louis Peres