Elle vous semble d'une sensualité à la fois toute barbare et raffinée<
(Gustave Flaubert, Par les champs et par les grèves)
Cette étrange statue ne se trouve plus sur les hauteurs de Castennec où elle se dressait initialement, non loin de la stèle gauloise, mais dans le parc de l'ancien château de Quinipily, à Baud.
Haute de 2,15 mètres, elle représente une femme nue, les mains posées au-dessus du ventre et portant une curieuse étole qui lui recouvre le sexe. Elle domine, dans son contexte actuel, une auge qui peut contenir 3 600 litres d'eau.
Selon toute apparence, il s'agit d'une divinité de la fécondité, ce qu'en a apparemment retenu la population locale, puisqu'au XVIIème siècle, elle était toujours objet d'un culte païen. Un texte rapporte que « les filles qui avaient envie de se marier faisaient leur offrande d'une manière indécente, pour obtenir leurs souhaits. » On la désignait alors sous le nom d'Ar groareg Houarn (la femme de fer) ou de Groah Hoart, (la vieille gardienne), noms qu'il faut peut-être rapprocher de Gward, la « garde », nom du site où elle se dressait. En 1661, alerté par ces dévotions peu chrétiennes, l'évêque de Vannes la fait jeter dans le Blavet. Mais trois ans après, en 1664, les gens du pays l'en retirent et reprennent les rites ancestraux. L'évêque décide alors de la faire détruire et en fait marteler les formes trop généreuses. Mais les ouvriers n'osent s'acquitter de cette mission et la rejettent dans le Blavet.
C'est en 1695 que le comte de Quinipily, gouverneur de Vannes, la sauve définitivement en la tirant de l'eau et en l'installant dans le parc de son château. Ce qui apparemment n'aurait pas interrompu, jusqu'à nos jours, entre les heures de visite, certaines dévotions discrètes, et peut-être bien suspectes.
L'origine de la statue est en fait mal définie : elle serait, pour certains, postérieure au Xème siècle, ou bien ce serait un faux, réalisé sous Louis XIV, pour remplacer celle qui avait été jetée à la rivière et qui aurait été irrémédiablement brisée. Mais elle semble plutôt avoir été attachée au site gallo-romain de Sulim, et ce serait une antique idole, peut-être une Isis égyptienne, ou une Cybèle, vénérée par les légions romaines.
La Vénus de Quinipily